solidarité avec Chiara, Claudio, Mattia et Niccolò
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Posts from — décembre 2005

Amiante et uranium sont sur un bateau. Qui c’est qui crève ?

L’ouvrage principal de la ligne Lyon-Turin est un tunnel de 53 km sous les Alpes qui unira St-Jean-de-Maurienne à Venaus. Sa portée est telle qu’il nécessite de recueillir un nombre d’informations considérable avant d’engager le projet définitif vers 2009.

Les travaux de base portent donc principalement sur le creusement de quatre descenderies et galeries de reconnaissance à Modane/Villarodin-Bourget, St-Martin-la-Porte et La Praz en France, Venaus en Italie.

Les descenderies sont des ouvrages souterrains de plusieurs kilomètres qui permettent de rejoindre, au cœur du massif, le niveau du futur ouvrage principal, le Tunnel de base. Au cours des différentes phases d’utilisation, les descenderies remplissent trois fonctions : en phase d’études, elles donnent accès aux premières galeries de reconnaissance, ce qui aide à mieux connaître la structure géologique du terrain et à préciser les méthodes de construction, les coûts (il est prévu de dépenser 550 millions d’euros rien que pour cette phase de reconnaissance) et les délais définitifs. Ensuite, viendra peut-être le temps des travaux de réalisation du tunnel de base et, à ce moment, elles donnent la possibilité de le creuser depuis les 17 points d’attaque prévus. Enfin, une fois le tunnel réel en service vers 2020, les descenderies serviront à sa ventilation et d’accès aux équipes de maintenance.

Les trois descenderies sont déjà en travaux : après une première phase de début 2002 à juillet 2004, l’excavation de la descenderie de Modane doit reprendre fin 2005 jusque mi-2007. La descenderie de Saint-Martin-la Porte a commencé en second, début 2003, et devrait être achevée mi-2006. Enfin, le début des travaux de la dernière descenderie côté français, celle de La Praz (située sur la commune de Saint-André) a officiellement été inauguré le 13 octobre 2005. La galerie de reconnaissance de Venaus, en Italie, n’a toujours pas été conquise par la CMC, la coopérative à la tête du consortium qui doit la réaliser.

Enfin, après ce tunnel principal qui sort à Venaus, le tracé prévoit ensuite de creuser 44 km à flanc de montagne entre Bruzolo (Val Susa) et Settimo Torinese (périphérie de Turin), dont 23 km de tunnel de Grange à Borgone. Ce dernier s’accompagne de trois galeries secondaires (des « fenêtres de sécurité ») dans les villages de Rivera, Caprie et Grangetta.

En Val Susa, ce sont près de 1,15 millions de mètres cubes de roche contenant de l’amiante qui vont être extraits et stockés un peu plus loin, à Tetti S. Mauro. L’amiante est un minéral fibreux qui, réduit à l’état de poudre, en particules microscopiques, est facilement dispersé par le vent avant d’être respiré. Le mésothéliome, un cancer des poumons qui se développe 15-20 ans après ces inhalations, est mortel dans 100 % des cas et conduit à la mort environ 9 mois après le diagnostic. Quant à l’uranium, répertorié depuis 1965 dans le massif d’Ambin, il sera extrait 15 millions de mètres cubes en contenant : inhalé, il cause le lymphome, un cancer non moins pénible, sans compter qu’il aura l’agréable plaisir de contaminer de façon incommensurable les nappes phréatiques d’une part, les cours d’eau qui serviront d’irrigation aux chantiers ensuite.

Le meilleur argument du monde en faveur du Turin-Lyon, s’il en existait un, ne vaudra jamais ces conséquences-là sur une population.

décembre 12, 2005   Commentaires fermés sur Amiante et uranium sont sur un bateau. Qui c’est qui crève ?

Mais bordel, où veulent-ils donc aller si vite ?

Un lieu commun voit les montagnards comme des personnes tranquilles et pacifiques. Des gens sereins qui vivent dans des endroits préservés. Peut-être les montagnards du Val Susa étaient-ils autrefois tranquilles et pacifiques. Depuis quelques temps en revanche, ils sont plutôt enragés. Le progrès et l’argent veulent en effet bouffer leur vallée qui, comme beaucoup d’autres endroits du monde, est déjà en piteux état.

C’est à travers le Val Susa que devrait passer la ligne de train TAV/TAC (Train à Grande Vitesse/Train à Grande Capacité, respectivement pour les passagers et les marchandises) de Turin à Lyon, faisant partie d’un projet de mobilité « rapide » au niveau européen. En partant de Turin, le train super-rapide devrait traverser un premier tunnel (Musinè-Gravio) de 23 kilomètres de long, pour déboucher dans la Vallée Haute, où un autre tunnel de 53 kilomètres devrait réunir Venaus en Italie à St Jean-de-Maurienne en France. Incroyable, pas vrai ? Ne serait-ce que par la quantité d’amiante et d’uranium qui sortira de ces gros trous, pour se déverser avec la brise du soir sur les villages de la vallée et sur Turin. La ligne à grande vitesse est présentée dans les médias (en particulier par TG3 et le journal La Stampa, qui appartient à Agnelli le patron de FIAT) comme une bénédiction qui sauverait le Piémont du déclin économique. Des études indépendantes ont pourtant relevé que du point de vue des transports, ce projet est totalement inutile. La ligne ferroviaire déjà existant est à peine exploitée à la moitié de sa capacité. En somme, il suffirait d’investir (et moins) pour maintenir en service la ligne présente. On éviterait entre autre les massacres liés au manque de sécurité, comme celui de Crevalcore ou, par chez nous, de Madonna dell’Olmo.

Il est évident que la construction de lignes à grande vitesse est un banquet exquis préparé pour les grands groupes industriels et financiers. Il suffit de rappeler que parmi les principaux intérêts économiques qui sont derrière le TAV se trouve le clan Agnelli. Les dommages environnementaux liés à la construction de la nouvelle ligne de train seront énormes pour le Val Susa, avec des nappes phréatiques asséchées par les fouilles, une pollution sonore et, surtout, un million de mètres cubes extraits, contenant de l’amiante et de l’uranium.

Ce qui se traduira pour la santé des habitants du Val Susa et des turinois par des mésothéliomes (un cancer de la plèvre provoqué par l’inhalation de l’amiante, mortel dans 100% des cas) et des lymphomes (pour être clair, ce dont sont malades les militaires qui ont été exposés aux projectiles à l’uranium au Kosovo).

La population de la vallée lutte depuis des années contre ce projet. Cette opposition tenace a fait patiner pendant des années les sondages à partir desquels partirait la construction de la ligne à grande vitesse. Au début de l’automne, le gouvernement et les entreprises prestataires ont prévu de donner le feu vert au début des travaux, mais la population occupe désormais depuis des mois les sites où devraient ouvrir les chantiers.

Rappelons la marche du samedi 4 juin 2005, qui a vu défiler 30 000 personnes pour dire aux chefs de bord qu’ils ne voulaient pas entendre parler de grande vitesse.

Rappelons aussi les nombreuses actions de sabotage contre les premiers relevés de terrain, à cheval entre 1997 et 1998. Trois anarchistes furent accusés d’entre être les auteurs, et dénoncés comme étant des « éco-terroristes » (terme curieux qui définit ceux qui défendent l’environnement contre les griffes du capital). Des années après, le procès s’est terminé sans que les juges puissent prouver leurs accusations, mais deux d’entre eux, Edoardo Massari et Maria Soledad Rosas, étaient déjà morts en incarcération.

Leur fin dramatique nous rend encore plus déterminés à ne pas baisser la tête.

Vendredi 9 septembre 2005, de 16 à 20h,
se tiendra un banquet informatif devant la gare.

Parce que nous sommes solidaires avec la lutte contre cette balafre supplémentaire contre l’environnement et ceux qui y vivent.

Parce que nous sommes conscients que la grande vitesse n’est qu’une des griffes (qui se nomme ailleurs tunnels, mégas-digues, infrastructures olympiques, antennes et pylônes, etc.) avec lesquelles le pouvoir attente à nos vies et à notre terre. Partout.

Parce que nous voulons lancer un signal à ceux qui mettent en place le TAV : même en dehors du Val Susa, leur nocivité rencontrera l’hostilité qu’elle mérite.

[Tract italien distribué simultanément dans plusieurs villes alpines avant le début annoncé des travaux en Val Susa]

décembre 12, 2005   Commentaires fermés sur Mais bordel, où veulent-ils donc aller si vite ?

Un passé de sabotages

Un passé de sabotages

1996

23 août : Deux molotovs sont lancés près de Bussoleno contre la foreuse utilisée pour sonder le sous-sol. Des tags contre le Tav sont trouvés sur place. 50 000 euros de dégâts.

27 novembre : Une cabine électrique de la ligne ferroviaire Turin-Modane est incendiée sur les hauteurs de Bruzolo. Des tags contre le Tav sont trouvés sur place.

24 décembre : Les transformateurs électriques d’un relais de télévision de la Rai et d’un relais de téléphone Omnitel à côté sont incendiés près de Mompantero. Des coups de fusils sont tirés contre les deux cabines. On retrouve écrit sur une église voisine « Valsusa libera ».

1997

26 janvier : Du liquide inflammable est jeté sur les parties électriques et le tableau de commande d’une foreuse à Crotte di Chianocco. On retrouve sur place des tags contre le Tav et les Mondiaux de ski. 10 000 euros de dégâts

6 février : Le générateur de courant d’un chantier où opère une foreuse saute à l’aide d’un mélange de liquide inflammable et de poudre de cartouches près de Mompantero. Des tags contre le Tav et les Mondiaux de ski sont laissés sur place. 15 000 euros de dégâts. Un relais de téléphone situé à côté est aussi touché, sa cabine électrique se prend des coups de fusils.

18 mars : Après avoir pénétré de nuit dans le tunnel de l’autoroute A32 à Giaglione, des saboteurs anonymes font sauter son canal de distribution électrique à la dynamite. Sans revendication. Plus de 25 000 euros de dégâts.

21 mai : Double attaque dans la zone de Mompantero. Les câbles d’un relais de télévision Mediaset sautent à la dynamite à Bianco, tandis qu’une foreuse brûle à Moetto. Sans revendication. 35 000 euros de dégâts.

15 octobre : La maison d’Ugo Iallasse, dirigeant de la Sitaf (qui gère l’autoroute de Fréjus qui passe dans la vallée), se prend de puissants pétards.

4 novembre : Une explosion endommage deux relais situés sur les hauteurs de Borgone di Susa. Leurs antennes servaient à plusieurs chaînes télés et radios, ainsi que de pont-radio pour les carabiniers.

10 novembre : Explosion manquée d’un dispositif feu/bonbonne de gaz contre une cabine électrique de blocage de la ligne ferroviaire Turin-Modane. Un tag contre le Tav qui ne semble pas récent est retrouvé sur place.

1998

20 janvier : Après avoir dérobé de l’outillage, des inconnus incendient de nuit la mairie de Caprie. Le feu, parvenu au garage municipal, provoquera une explosion causant de lourds dégâts à l’édifice.

Extrait de A toute allure, La lutte du Val Susa contre le TGV Lyon-Turin par Quelques révoltés métropolitains (première parution : décembre 2005)

décembre 12, 2005   Commentaires fermés sur Un passé de sabotages

A Toute allure, La lutte du Val Susa contre le TGV Lyon-Turin

De 1996 à fin 2005, état des lieux de la lutte, toujours en cours, menée en Italie contre le TGV Lyon-Turin.

Sabotages, manifestations, blocages, occupations, actions directes, textes critiques, etc.

APRÈS AVOIR SOUTENU l’incendie qui s’est développé à partir de fin octobre dans tout le pays, dépassant largement l’épiphénomène « jeunes de cités » pour contaminer de larges zones du territoire, impliquer des dizaines de milliers de noctambules, et frapper commissariats, écoles, bus, entrepôts et autres supermarchés, nous n’avons pu regarder que d’un oeil bienveillant la révolte du Val Susa, de l’autre côté des Alpes.

CONCERNANT la population entière de cette étroite vallée située entre Modane et Turin, la rage explose contre les débuts de la construction d’une ligne de train fret/voyageurs à grande vitesse. Bien sûr il y a l’uranium et l’amiante qu’ils doivent bouffer avec les futurs travaux, bien sûr il y a le bruit pour vingt ans, bien sûr il y a la montagne éventrée pour le profit de quelques uns. Mais il y a surtout la volonté de préserver envers et contre tout – la technologie, le progrès ou le choix des démocrates élus – un certain rapport à leur environnement et la possibilité de décider par eux-mêmes de leur vie.

DES SABOTAGES entre 1996 et 1998 aux marches sur les sentiers des partisans, puis des manifestations aux grèves sauvages, des blocages de route et voies ferrées aux durs affrontements avec la flicaille pour empêcher les premiers sondages de terrain, ils ont su user en quelques mois d’une grande partie du langage de la critique pour affirmer qu’ils ne veulent pas de cette Grande Vitesse.

ET NON CONTENTS de fêter joyeusement en ces mois d’hiver chaque recul des techniciens venus fouiller la vallée avant de la déchirer, ils poussent en plus le comble jusqu’à se confronter dans de larges assemblées, réfléchir ensemble et comploter contre ce monde.

SI CETTE ATTAQUE de la civilisation a su trouver une réponse collective qui nous en rappelle d’autres (contre le nucléaire à Plogoff ou Chooz par exemple), elle nous a comme première solidarité poussés à publier ce petit dossier en guise d’antipasto.

Quelques révoltés métropolitains

Télécharger le pdf ou lire les textes un à un sur le site :

Un passé de sabotages

Mais bordel, où veulent-ils donc aller si vite ?

Amiante et uranium sont sur un bateau. Qui c’est qui crève ?

A Sarà Düra (Vous allez en chier)

Spéciale dédicace

Bas les pattes du Val Susa,

décembre 12, 2005   Commentaires fermés sur A Toute allure, La lutte du Val Susa contre le TGV Lyon-Turin